Terre & Vie , Nos 46, 47, 48
et 49, Janvier, Févrie, Mars et Avril 2001
ROYAUME DU MARROC
*********
MINISTERE DE L'AGICULTURE, DU DEVELOPPEMENT RURAL ET DES EAUX ET FORET
COMMUNICATION SUR
LA SECURITE ALIMENTAIRE AU MAROC :
QUELLE STRATEGIE A L'AUBE DU XXI SIECLE ?
Présentée par Monsieurs :
· Abdellatif GUEDIRA : Directeur
de la production végétale (MADREF)
· Abdelhak TBER : Directeur de l'Elevage (MADREF)
· MOstapha BERRADA : Secrétaire Général de I.A.V. Hassan II - Rabat
A L'OCCASION DE LA SESSION D'AUTOMNE
DE L'ACADEMIE DU ROYAUME DU MAROC
RABAT, LES 20-21-22 NOVEMBRE 2000
TABLE DE MATIERE
INTRODUCTION.
I - CONCEPT DE SECURITE
ALIMENTAIRE
II- BILAN DES REALlSATIONS EN
MATIERE DE SECURITE ALIMENTAIRE 4
1. Au niveau mondial
2. Au niveau national
a) Produits végétaux
b) Produits de l'élevage
c) Produits halieutiques
III? PERSPECTIVES D'AVENIR DE LA
DEMANDE ET DU NIVEAU DE LA SECURITE ALIMENTAIRE
IV- STRATEGIE DE LA SECURITE
ALIMENTAIRE AU MAROC
1. Lutte contre la pauvreté
2. Stabilité de la production nationale.
2.1. Utilisation de l'espace agricole
2.2. Gestion de l'aléa climatique
2.3. Irrigation et valorisation de l'eau
2.4. Valorisation des ressources en terres et territorialisation
2.5. Développement des filières de production
2.6. Protection de l'environnement et de sa durabilité.
2.7. Croissance démographique
2.8. Développement des ressources humaines et promotion des investissements
CONCLUSION
--------------------
INTRODUCTION.
L'alimentation constitue un élément essentiel pour la survie et la préservation
de la santé des populations. Elle est également un facteur d'équité; chaque
être humain doit y avoir accès et chaque gouvernement doit assurer les sources
d'alimentation nécessaires à la satisfaction des besoins intérieurs.
C'est ainsi que la garantie de la sécurité alimentaire a toujours été une
préoccupation majeure des pouvoirs publics de tous les pays, indépendamment de
leur niveau de développement. Cependant, les écarts de développement
socio-économique font que le contenu de la sécurité alimentaire n'est pas perçu
de la même façon par les pays développés et les pays en voie de développement.
Ce contenu se pose davantage en termes de qualité et de salubrité pour les
premiers et en termes de disponibilité et d'accès pour les seconds.
Au Maroc, la garantie de la sécurité alimentaire a été toujours hissée parmi
les priorités en matière de développement économique et social. Ainsi, des
efforts importants ont été consentis pour la stabilité de l'approvisionnement
des populations en produits alimentaires et l'amélioration des conditions de
vie et du pouvoir d'achat des ménages.
Il n'en demeure pas moins que des défis importants restent à relever, notamment
en ce qui concerne la lutte contre la pauvreté et la stabilité de la production
agricole nationale.
Le présent document s'efforce, dans une première partie, de présenter le
concept de sécurité alimentaire, le bilan des réalisations et les perspectives
d'avenir en matière de sécurité alimentaire, et dans une deuxième partie de
tracer les grands axes de la stratégie nationale visant à garantir la sécurité
alimentaire à l'aube du prochain millénaire.
I - CONCEPT DE SECURITE ALIMENTAIRE
L'alimentation a toujours été un souci majeur de l'homme. Elle se pose en terme
de nécessité et d'obligation dans la mesure où elle conditionne sa survie, sa
croissance, son développement et son activité.
De ce fait, elle a constitué une préoccupation permanente aussi bien des
individus que de la société et des gouvernements.
C'est ainsi que l'appréhension de la question alimentaire a connu, en fonction
du développement des sociétés une évolution importante allant des
préoccupations d'autoconsommation des individus, à celle d'autosuffisance des
nations, pour enfin se positionner en terme de sécurité alimentaire.
Au niveau international, il est admis que cette notion se définit de la manière
suivante: " La sécurité alimentaire existe lorsque tous les êtres humains
ont, à tout moment et en tout lieu, un accès physique et économique à une
nourriture suffisante, saine et nutritive leur permettant de satisfaire leurs
besoins énergétiques et leurs préférences alimentaires pour mener une vie saine
et active ".
Ainsi présentée, la garantie de la sécurité alimentaire repose, donc, sur
quatre composantes essentielles:
¨ La disponibilité des produits alimentaires: il s'agit de garantir durablement
la disponibilité d'une alimentation suffisante, afin de répondre à la
croissance démographique, à l'urbanisation et à l'évolution des comportements
alimentaires.
¨ La stabilité de l'approvisionnement: Les produits alimentaires doivent être
disponibles à des prix raisonnables et selon des modalités stables. Les prix
des produits alimentaires sont souvent peu stables de manière intrinsèque7 en
raison de la rigidité de la demande en principales denrées agricoles par
rapport au prix de l'offre.
¨ L'accès aux produits alimentaires: la sécurité alimentaire ne peut être
assurée que si l'accès aux produits alimentaires est garanti sur les plans
physique et économique. Si l'accès physique à la nourriture peut être entravé
par des événements imprévus tels que la guerre, les embargos ou les
restrictions frappant les exportations, l'accès économique peut être gêné par
d'autres facteurs tels que l'insuffisance du pouvoir d'achat ou la pauvreté.
Alors que les facteurs qui déterminent l'accès physique à l'alimentation sont
partagés par tous les pays tant développés qu'en voie de développement, les
facteurs entravant l'accès économique sont plus accentués dans les pays en
développement.
¨ La préférence et la qualité :il s'agit de la nécessité de mettre a la
disposition de la population des produits alimentaires ne présentant aucun
risque sur la santé, de bonne qualité et aptes à satisfaire les préférences du
consommateur. D'après l'OMS, la salubrité des aliments prend de plus en plus
d'importance en matière de santé publique. Les maladies d'origine alimentaire
aggravent l'insécurité alimentaire. Dans le monde entier, les gouvernements
redoublent d'efforts pour l'améliorer, en réaction à un nombre croissant de
problèmes et à des inquiétudes de plus en plus vives de la part des
consommateurs.
L'avènement de la mondialisation du commerce et des échanges, comme une
nouvelle donne de l'économie mondiale constitue aussi une préoccupation dans la
mesure où la sécurité alimentaire d'un pays peut être perturbée ou affectée par
les conditions économiques et sociales des autres pays. En considération de ce
qui précède et compte tenu du niveau de développement économique et social des
pays, le contenu de la sécurité alimentaire prend des aspects différents.
Pour les pays développés, les préoccupations de sécurité alimentaire se posent,
principalement, en termes de qualité, de malnutrition par pléthore et de
salubrité plutôt que de disponibilité ou d'accès; l'obésité aux Etats Unis, la
vache folle en Grande Bretagne, la dioxine en Belgique et la listériose en
France, ne sont que des exemples récents de l'impact des denrées alimentaires
sur la santé des populations de ces pays. Au niveau des pays en développement, ce
contenu est lié, d'une part, aux aspects de disponibilité et d'accès, à tout
moment et en tout lieu, à une nourriture suffisante et, d'autre part, à la
nature de l'activité des populations, selon qu'elles soient productrices de
denrées alimentaires ou non.
Pour le cas du Maroc, la politique économique et sociale qu'il a connue depuis
l'indépendance a été caractérisée par la priorité accordée à l'agriculture et
aux aménagements hydroagricoles pour assurer la sécurité alimentaire du pays~
en particulier en produits alimentaires dits de base (céréales, sucre, huiles,
viandes, lait et dérivés). D'importants efforts et moyens ont été consentis par
l'Etat pour le développement de leur production. En effet, jusqu'au début des
années 90, le concept de sécurité alimentaire a été conçu comme étant la
réalisation de l'autosuffisance en denrées alimentaires de base et donc,
l'approvisionnement du pays en totalité à partir de la production nationale.
Le secteur agricole avait donc un rôle primordial dans la réalisation de la
sécurité alimentaire. Cette perception coïncidait avec une quasi-maîtrise par
l'Etat des processus de production agricole; ce qui a conduit à considérer
l'agriculture comme étant la source principale de satisfaction des besoins du
pays en ces produits, sans tenir compte ni de ses capacités réelles, ni des
conditions aléatoires de sa production, et sans chercher, par ailleurs, toutes
les opportunités offertes par le marché international.
Cette perception a, cependant, montré ses limites, car l'Etat n'a pas pu, à lui
seul, supporter les surcoûts nécessaires à la réalisation de l'autosuffisance,
objectif qui s'est avéré très ambitieux et onéreux pour certains produits, dont
la capacité de production est très limitée et demeure conditionnée par des aléas
climatiques, en particulier pour les céréales et les huiles pratiquées
essentiellement en bour.
De l'autre coté, les arbitrages entre la garantie de prix rémunérateurs aux
producteurs et la sauvegarde du pouvoir d'achat des consommateurs se sont
souvent soldés par une prise en charge par l'Etat des surcoûts s'y rapportant
et ce, à travers la mise en place de subventions directes des prix à la
consommation; tel est le cas de la farine nationale du blé tendre, du sucre et
des huiles des graines oléagineuses.
Depuis le milieu des années 80, l'avènement d'un nouveau contexte international
et l'évaluation des actions menées précédemment ont rendu la fonction de
l'agriculture, non plus régie par la réalisation de l'autosuffisance en
produits alimentaires de base, mais par la garantie de la sécurité alimentaire,
qui prend en compte les possibilités de production nationale et les
opportunités qu'offre le commerce international. Elle implique une production
intérieure assortie de la capacité d'importer qui permette de répondre, dans
les meilleures conditions économiques, aux besoins alimentaires du pays. De la
sorte, la contribution de la production nationale à la sécurité alimentaire du
pays devrait obéir aux conditions d'efficience économique.
Ainsi, la notion de sécurité alimentaire correspond à la réalisation de taux
stratégiques d'approvisionnement en denrées alimentaires à partir de la
production nationale.
Cette nouvelle approche n'intègre pas, toutefois, la dimension sociale de la
production agricole, car elle risque d'aboutir à une réduction de l'activité
agricole avec toutes les conséquences que cela entraîne principalement au
niveau de l'emploi, de l'exode rural, de la balance commerciale. Cette approche
présente certaines limites, notamment:
¨ Le caractère non transparent et incomplet de la libéralisation des marchés
agricoles mondiaux;
¨ La nécessité de disposer d'un "pouvoir d'achat en devises'~ des produits
alimentaires sur le marché international.
¨ L'incohérence de la mondialisation des échanges avec les politiques de
soutien de l'agriculture au niveau des pays développés, notamment les USA et
l'UE, où des subventions directes sont versées pour le soutien des revenus des
agriculteurs et des exportations des produits agricoles.
Il est évident, de ce point de vue, que le commerce international en comblant
les écarts entre la production et la consommation, doit permettre au pays
d'exploiter d'une manière plus efficace ses potentialités agricoles et tirer un
meilleur profit de ses avantages comparatifs.
Outre la référence à l'efficience économique, la sécurité alimentaire prend en
considération deux dimensions supplémentaires, à savoir la sécurité de
l'approvisionnement alimentaire, qui renvoie davantage au fonctionnement des
filières "alimentaires" (production, importation, transformation et
distribution) et la sécurité de l'accès de la population aux denrées de base
qui introduit la problématique de la répartition du pouvoir d'achat entre les
différentes catégories de consommateurs.
Dans le contexte national actuel, une approche basée sur la seule efficience
économique pour assurer au pays son approvisionnement alimentaire s'avère
incompatible avec l'importance et la multifonctionnalité du secteur agricole.
Elle risque d'aboutir à une réduction substantielle de ses activités et
d'induire en conséquence des effets préjudiciables sur les plans politique et
social. De ce fait, la sécurité alimentaire s'avère un impératif qui s'inscrit
d'emblée dans le champ de la politique agricole; elle est une prérogative des
pouvoirs publics et relève des attributs de la souveraineté nationale
II- BILAN DES REALlSATIONS EN MATIERE DE SECURITE ALIMENTAIRE
1. AU NIVEAU MONDIAL
Malgré une abondance des disponibilités alimentaires au niveau mondial, les
instances internationales évaluent le nombre de personnes qui souffrent
actuellement d'une sous-alimentation à environ 800 millions de personnes dans
les pays en développement et 34 millions dans les pays développés et à
économies en transition. Plus des trois quarts des êtres humains sous-alimentés
vivent en Asie, dans la région du Pacifique et en Afrique subsaharienne.
Bien que la part des produits alimentaires de la plupart des pays en
développement connaisse un accroissement relatif au niveau des importations, la
situation de leurs disponibilités alimentaires va en s'aggravant en dépit des
efforts poursuivis en matière d'augmentation et d'amélioration des productions
vivrières.
L'agriculture en irrigué contribue actuellement à hauteur de 40% de la
production alimentaire mondiale en n'utilisant que 17% seulement des terres
agricoles. D'après la FAO, 80% des productions alimentaires additionnelles
proviendraient des cultures irriguées. Ceci montre le rôle primordial que
jouera l'eau, à l'avenir, dans la garantie de la sécurité alimentaire mondiale,
ce qui milite en faveur d'une gestion raisonnée et rationnelle des ressources
hydriques.
Quant aux échanges des denrées alimentaires de base à l'échelle mondiale, ils
se caractérisent par le fait que seuls les excédents sont exportés. L'offre de
denrées agricoles destinées au marché international est faible comparativement
à la production globale intérieure des pays exportateurs. En effet, la quantité
de blé négociée sur le marché international correspond à environ 18,5 pour cent
de la production mondiale, le pourcentage pour le cas du riz étant d'environ
4,5 pour cent. C'est l'une des raisons expliquant qu'une variation au niveau de
la récolte d'un pays important sur le plan de l'exportation et/ou de la
consommation peut déterminer directement le mouvement des prix pratiqués sur le
marché mondial.
Une autre caractéristique des échanges agricoles est l'existence d'un nombre
limité de pays exportateurs qui dominent les marchés internationaux. Une telle
concentration des fournisseurs aggrave les variations des prix sur le marché
mondial, en cas de conditions météorologiques anormales dans ces pays.
La sécurité alimentaire a toujours constitué une préoccupation de la communauté
internationale. A cet effet, la FAO, a organisé en Novembre 1996, un Sommet
Mondial de l'Alimentation, auquel les chefs d'Etat et de gouvernements des
nations du monde entier ont participé. Ce Sommet a adopté la Déclaration de
Rome et le Plan d'Action du Sommet Mondial de l'Alimentation.
Les principaux objectifs de ce sommet sont se présentent comme suit:
· La garantie à tous les êtres humains, en tout moment et en tout lieu, l'accès
à une nourriture suffisante, saine et nutritive. Ainsi, il a été convenu de
réduire de moitié le nombre des personnes souffrant de la sous-alimentation
d'ici l'an 2015 ;
· La contribution permanente du développement agricole, rural et halieutique,
dans le progrès économique et social des pays et la prospérité des populations
;
· La préservation, l'amélioration et l'exploitation durable des ressources
naturelles et notamment les terres, les ressources en eau et les ressources
génétiques, pour garantir la sécurité alimentaire et le développement agricole
;
A travers cette Déclaration, tous les pays se sont engagés à faire des progrès
substantiels dans l'élimination du fléau de la faim et de la malnutrition.
Quant au Plan d'Action, il comporte sept engagements avec un objectif principal
de garantir la sécurité alimentaire aux niveaux individuel, familial, national,
régional et mondial. Ces engagements peuvent être résumés ainsi:
· La création d'un environnement politique, social et économique propice pour
l'éradication de la pauvreté;
· La mise en œuvre des politiques visant la garantie de la sécurité
alimentaire;
· La poursuite de politiques et méthodes participatives et durables de
développement alimentaire, agricole, halieutique, forestier et rural ;
· L'organisation du commerce international des denrées alimentaires et
agricoles ;
· La prévention des catastrophes naturelles et celles provoquées par l'homme ;
· L'encouragement de l'investissement public et privé pour le développement ;
· La mise en place de système de suivi évaluation du Plan d'Action du Sommet
Mondial de l'Alimentation.
Ainsi, les chefs d'Etat et de gouvernements ont réaffirmé le droit de chaque
être humain à accéder à une nourriture saine et nutritive. Ils ont, ainsi,
proclamé leur volonté politique et leur engagement commun et national pour
parvenir à la sécurité alimentaire pour tous et de déployer un effort constant
afin d'éradiquer la faim et de réduire de moitié le nombre de personnes
sous-alimentées d'ici 2015 au plus tard.
2. AU NIVEAU NATIONAL
La sécurité alimentaire au Maroc se pose essentiellement, d'une part, en terme
d'accès financier et de pouvoir d'achat reflétés par la pauvreté, et d'autre
part, en terme d'instabilité des niveaux de disponibilités à partir de la
production nationale.
§ La pauvreté concerne une frange importante de la population estimée à 5,3
millions de personnes (enquête 1998/99) soit près de 19% de la population
totale. Cette pauvreté, qui affecte 1,9 millions de personnes en milieu urbain
et 3,4 millions en milieu rural, touche de manière plus marquée les ménages à
taille élevée (8 à 9 personnes) et ceux dont le chef de famille est sans
instruction.
En terme d'évolution, la pauvreté au Maroc a diminué jusqu'en 1991 en passant
de 6,7 millions en 1970 (44% de la population) à 3,2 millions en 1991 (13% de
la population). A partir de 1991, cette situation s'est inversée pour se situer
actuellement à 19% de la population.
Cette aggravation de la pauvreté s'est accompagnée d'une réduction de l'écart
entre les plus riches et les plus pauvres en terme de dépenses. C'est ainsi
qu'en 1970, les 10% les plus riches dépensaient 30 fois plus que les 10% les
plus pauvres et qu'en 1998, ce rapport est passé à moins de 12 fois.
Face à cette situation, plusieurs actions visant l'atténuation de l'impact de
la pauvreté sont actuellement en cours de réalisation, aussi bien par les
pouvoirs publics que par les organisations non gouvernementales. Il y a lieu de
citer principalement:
· La création en 1998, sous la présidence effective de Sa Majesté le Roi
Mohamed VI, de la Fondation Mohamed V pour la Solidarité, qui œuvre à travers
une mobilisation des forces vives de la société civile. Des campagnes de
solidarité nationale sont organisées pour collecter des fonds, qui contribuent
à mettre au point une stratégie à long terme pour l'éradication des foyers de
la pauvreté et de la marginalisation. Cette fondation, qui n'est pas une structure
alternative pour se substituer aux différents organismes de l'Etat ou
institutions publiques en charge de la protection et de la couverture sociale,
réserve les fonds collectés à la réfection des maisons de bienfaisance et à
l'intégration de leurs résidents dans la vie normale. Elle apporte, également,
un soutien financier aux structures d'accueil des enfants orphelins et démunis
et aux institutions sociales, et réalise divers programmes au profit de la
fille et de la femme rurale, en renforçant les structures sociales de base et
en les dotant de moyens pour leur permettre d'assurer des ressources stables.
La création du Fonds Hassan II pour le développement, dont les objectifs
consistent à réaliser des projets générateurs d'emplois multiples et diversifiés
et promouvoir le monde rural. La création d'un ministère chargé de la condition
féminine, de la protection de la famille et de l'enfance et de l'insertion des
handicapés. L'instauration d'un environnement favorable pour l'encouragement
des ONG et du secteur privé à contribuer à la lutte contre la pauvreté.
§ L'instabilité de l'approvisionnement à partir de la production nationale: le
Maroc, grâce à une politique volontariste de l'Etat, est parvenu à réaliser la
sécurité alimentaire pour les denrées de base; des résultats globalement
positifs, quoi que modestes pour certains produits, ont permis à notre pays de
réduire sensiblement cette instabilité, en particulier pour le sucre, les
viandes, le lait et les fruits et légumes.
Parmi les actions déterminantes ayant permis la réalisation de ces résultats
figure la politique de l'eau, caractérisée par la construction de barrages,
l'aménagement hydro-agricole et la mise en valeur agricole des périmètres
irrigués. Les efforts déployés dans ce domaine ont été matérialisés par la
construction des barrages dont la capacité actuelle est de l'ordre de 13,7
milliards de m3 d'eau et l'aménagement hydro-agricole de 1 million d'hectares
environ irrigués de manière pérenne.
Le secteur irrigué, qui ne représente que 10% environ de la superficie agricole
utile, contribue, en année normale, pour 45% de la valeur ajoutée, 75% des
exportations des produits agricoles et 50% de l'emploi direct dans
l'agriculture. Son importance dans la contribution à la couverture des besoins
intérieurs en produits agricoles, se présente comme suit :
Secteur |
Part de la
production provenanr de l'errigué (%) |
Céréales |
15 (avec un
maximum de 25% en année séche) |
Cultures
sucrières |
95 |
Agrumes |
100 |
Légumes |
82 |
Cultures
forragères |
75 |
Lait |
75 |
Viandes rouges |
26 |
Contrairement aux céréales et aux viandes rouges où l'essentiel de la
production est réalisé en zones d'agriculture pluviale et des parcours, les
productions des autres secteurs sont issues des zones irriguées. Les Grands
Périmètres Irrigués (GPI), érigés en pôles régionaux de développement
économique et social, contribuent à la réalisation de l'essentiel de ces
productions et permettent ainsi de sécuriser l'approvisionnement du marché
intérieur en produits agricoles, notamment les fruits et légumes, le lait et le
sucre.
En outre, les périmètres irrigués contribuent à l'amélioration des revenus des
agriculteurs et offrent un cadre de vie relativement meilleur, grâce aux
infrastructures économiques et sociales existantes (unités agro-industrielles,
routes et pistes, électrification, écoles, agglomérations).
Les superficies non irriguées représentent près de 90% de la SAU; leur
utilisation concerne essentiellement les céréales, les légumineuses et les
cultures oléagineuses, avec une production, caractérisée par des fluctuations
inter-annuelles importantes dues aux aléas climatiques, en particulier la
sécheresse. A titre d'exemple, la production céréalière permet de couvrir près
de 60% des besoins en moyenne avec des fluctuations allant de 21% en année
sèche à 118% en année pluvieuse.
Ainsi, la contribution des principales productions végétales et animales à la
couverture des besoins intérieurs de consommation se caractérise par une
certaine stabilité pour les productions situées en irrigué et des fluctuations
plus au moins importantes pour celles situées en zones pluviales.
Cette situation est illustrée, ci-après, pour les principales filières de
production agricole:
a) Produits végétaux
o Céréales
La superficie réservée aux céréales s'élève à 5,3 millions d'hectares environ,
représentant près de 70% de la SAU, hors jachère. La production est fortement
dépendante du climat. Elle couvre en moyenne 60% des besoins avec un maximum de
118 % en 1995?96 et un minimum de 21 % en 1994?95.
Actuellement, le niveau moyen de la demande totale en céréales s'élève à 84
millions de quintaux, répartis à raison de 60 millions de quintaux (71%) pour
la consommation humaine directe et 24 millions de quintaux (29%) pour la
consommation animale, les semences et les pertes. La consommation animale de
l'orge et du mais représente respectivement environ 40% et 70% de la demande
totale en ces céréales.
La demande humaine en cette denrée se situe à un niveau relativement élevé et
correspond par personne et par an à plus de 210 kilogrammes. Cette demande
domine le régime alimentaire moyen et lui imprime ses principales
caractéristiques nutritionnelles. En effet, les céréales assurent l'apport
d'environ 2/3 des besoins en calories et 3/4 des protéines. Ainsi, cette
demande a évolué selon un rythme d'accroissement annuel équivalent à celui
enregistré par la population, ce qui suppose une relative constance de la
demande directe par personne et par an.
La structure de la demande directe en céréales a été marquée par une
augmentation importante de la part du blé tendre qui est passée de 27% en 1960
à plus de 60% actuellement, indiquant une dynamique de substitution
significative du blé tendre aux autres céréales et à l'orge en particulier.
Cette substitution est encore plus prononcée en années de sécheresse.
o Sucre
Les cultures sucrières couvrent actuellement 83.000 ha et sont essentiellement
pratiquées en zones irriguées. Ce secteur a connu une forte croissance entre
1963 et 1999 en termes de superficies et de productivité. La production s'élève
actuellement à 2,9 millions de tonnes de betterave et 1,3 millions de tonne de
canne à sucre et permet la réalisation d'une production de 500.000 T de sucre
environ, couvrant 52% des besoins de consommation avec un maximum de 66 %
durant la campagne 1992?93.
L'évolution du taux de couverture des besoins en sucre a connu une tendance
ascendante. Ce taux est passé de 0% en 1963 pour atteindre 65% à partir de la
fin des années 80. I1 a même dépassé ce seuil en 1983 et en 1988. Cette
évolution soutenue de la production sucrière au Maroc a permis d'atteindre les
objectifs tracés en matière de sécurité alimentaire.
Cependant, à partir des années 90, on constate une contre-performance de la
filière qui coïncide, entre autres, avec la libéralisation du commerce et des
prix et le désengagement de l'Etat. Cette contre-performance est due à la
stagnation de la production sucrière face à l'accroissement continu de la
consommation, due à l'accroissement démographique.
En général, le niveau d'auto-approvisionnement en sucre peut être considéré
comme une des grandes réussites de la politique agricole, puisque celle-ci a
permis au Maroc de passer d'une situation d'importateur net de sucre en 1963 à
une situation où plus de la moitié des besoins sont produits localement.
o Huiles
La production des huiles alimentaires est constituée des graines oléagineuses
et des olives. Elle s'élève actuellement en moyenne à 75.000 T dont 55.000 T
des huiles d'olives et 20.000 T des huiles de graines oléagineuses. Cette
production contribue à la couverture de 20% des besoins de consommation, avec
des fluctuations allant de 13 à 23% selon les campagnes.
L'analyse comparative de la production et de la consommation d'huile (graines
et olive) montre que:
· Les possibilités de la production nationale sont restées très limitées et ne
reflètent pas les potentialités réelles en la matière notamment en ce qui
concerne l'huile d'olive;
· Les politiques suivies en matière de cultures oléagineuses n'ont pas atteint
les objectifs escomptés, et la production d'huile issue des graines est restée
très modeste. En effet, à l'exception de la période 1987?1992, marquée par un
effort soutenu de développement de la filière oléagineuse, notamment du
tournesol, la production est restée faible. Les principales contraintes
concernent la faiblesse du progrès technique, les conditions climatiques, la
faible exploitation des potentialités régionales de production et les
difficultés de commercialisation des récoltes;
· La libéralisation brutale et inachevée de la filière a eu des conséquences
négatives sur les producteurs, surtout que le secteur souffre d'une faible
organisation ne permettant pas de sauvegarder les intérêts des producteurs; ces
derniers se trouvent désarmés face à un partenaire agro-industriel mieux
organisé et plus ou moins déconnecté du segment productif;
· Le secteur de l'olivier a montré des potentialités importantes au Maroc, mais
n'a pas bénéficié du même soutien que 1'Etat a alloué aux graines oléagineuses,
notamment en matière de soutien des prix à la consommation ;
· La faible intégration des filières et leur faible compétitivité par rapport
aux autres filières et vis-à-vis du marché mondial, ainsi que l'importance du
facteur climatique puisque les cultures oléagineuses et l'olivier sont faiblement
présentes en irrigué.
L'évolution du taux de couverture des besoins en huiles montre une insuffisance
très marquée aussi bien en terme d'approvisionnement des besoins à partir de la
production nationale, qu'en terme de la régularité de la production qui est
très fluctuante.
Une réforme du système de prix et de compensation du secteur des oléagineux, a
été récemment mise en œuvre. Elle vise essentiellement la relance de ce secteur
sur de nouvelles bases offrant une meilleure visibilité aux opérateurs. Cette
réforme consiste en une baisse des droits de douane à l'importation des huiles
et des graines, un soutien direct à la production locale des graines
oléagineuses et une suppression de la subvention forfaitaire à la consommation.
Les impacts attendus se traduiront par une garantie des prix à la production,
une meilleure offre commerciale de la part des industriels à des prix
compétitifs et un allègement de la charge du budget de l'Etat.
Concernant le secteur oléicole, la mise en œuvre du Plan de développement à
moyen et long terme de ce secteur, lancé en 1998?99, nécessite le soutien de
l'Etat, à la lumière de la réforme du système compensation des oléagineux.
Le soutien demandé sera destiné essen1iellement à financer les actions visant
l'accroissement de la productivité des plantations, la modernisation de l'outil
de transformation et la promotion de la consommation de l'huile d'olive de
qualité.
o Fruits et Légumes.
Le secteur horticole, hors olivier, occupe une superficie moyenne de 570.000 Ha
(6% de la SAU), et réalise une production moyenne de 6 millions de tonnes.
Celle-ci assure entièrement la satisfaction de la demande intérieure exprimée
et contribue pour une part importante dans des exportations agricoles (1
million de tonnes en moyenne). Les principaux produits exportés sont les
agrumes, les primeurs (tomate et pomme de terre essentiellement), les fruits
divers (melon. fraise,...) et les produits transformés. Cependant, la
production limitée de certains fruits secs tels que les raisins secs, les
pruneaux et les amandes entraînent le recours à des importations de faibles
quantités de ces produits. Par ailleurs, la libéralisation du commerce
extérieur de cette filière a incité à l'importation de certains fruits,
notamment la banane et les pommes, caractérisés au niveau du marché
international par des prix très compétitifs par rapport aux coûts de revient de
la production nationale.
b) Produits de l'élevage
o Lait
La production laitière s'élève en 1999 à près de 1,1 milliards de litres,
enregistrant une progression moyenne annuelle de 2,7% entre 1975 et 1992, et
près de 5 % entre 1993 et 1995. Cette production permet actuellement de
satisfaire la totalité de la demande en lait frais depuis 1983 et de répondre à
86% de la demande totale en lait et dérivés. Cependant, les niveaux de
consommation par habitant (40 litres /hab./an) restent encore en deçà des
normes nutritionnelles recommandées (90 équivalents litres de lait par habitant
et par an).
o Viandes Rouges
En dépit des conditions climatiques marquées par des sécheresses récurrentes
durant les trente dernières années, la production des viandes rouges a
enregistré une progression moyenne annuelle de O,9% par an entre 1970 et 1999;
maintenant ainsi l'équilibre entre la demande et l'offre. Cette production se
situe actuellement en moyenne à 300.000 T et se caractérise par une
amélioration du poids moyen de carcasses qui est passé de 112 à 160 Kg pour les
bovins et de 11 à 14 Kg pour les ovins entre 1980 et 1999.
Cette évolution est le résultat d'une série de mesures et d'actions
concomitantes et intégrées pour le développement de la filière viandes rouges.
Celles-ci ont concerné l'aménagement et l'amélioration des terres de parcours,
l'amélioration de la productivité des races ovines locales dans leurs aires
géographiques, l'introduction des races bovines à viandes adaptées aux zones de
production, l'encadrement sanitaire généralisé du cheptel, l'assainissement du
réseau d'abattoirs pour l'amélioration de l'hygiène et de la salubrité des
viandes et l'incitation des producteurs à l'acquisition des facteurs de
production.
o Viandes blanches et oeufs
Depuis le début des années 70, le secteur avicole a connu un essor remarquable.
La production des viandes blanches est passée de 57.000 tonnes en 1975 à 230.000
tonnes en 1999, dont 180.000 tonnes proviennent du secteur industriel, soit un
taux d'accroissement moyen de 11% par an. Cette progression est liée au
développement du secteur industriel privé dont le rythme d'accroissement a été
plus fort durant les cinq dernières années. Cette progression observée est la
résultante de mesures incitatives ayant permis au secteur de répondre, avec
célérité à la demande du marché. Ainsi, la part des viandes blanches dans la
consommation (toutes viandes) est passée de 23% en 1970 à 40% en 1999.
Quant à la production des œufs de consommation, elle s'est accrue de 400
millions en 1975 à 3,2 milliards d'unités en 1998, soit une augmentation
moyenne annuelle de 7,7%. La part du secteur industriel a été de 2,3 milliards
d'unités.
c) Produits halieutiques
La production halieutique au Maroc s'élève en moyenne à 850.000 tonnes. Elle
permet de satisfaire les besoins du marché intérieur et dégage des excédents
exportables. La valeur des exportations des produits de la mer se situe en moyenne
à 800 millions de $US.
Le secteur halieutique est handicapé par l'absence de véritables réseaux de
distribution et de commercialisation de poisson.
Les captures effectuées par la flotte côtière sont destinées à hauteur de 30% à
la consommation nationale en frais. Cette dernière s'élève à seulement 7,6 kg
par an et par habitant (9,88 kg dans le milieu urbain et 3,46 kg en milieu
rural). Ce niveau demeure très faible pour un pays à vocation maritime (16,1
kg/an/habitant en Mauritanie, 36,7 kg/an/habitant en Espagne et 9,5
kg/an/habitant en Tunisie).
III. PERSPECTIVES D'AVENIR DE LA DEMANDE ET DU NIVEAU DE LA SECURITE
ALIMENTAIRE
D'une manière générale, les rations alimentaires moyennes des ménages marocains
permettent de satisfaire les besoins nutritionnels exprimés en termes de
calories, de protéines et de principaux oligo-éléments et vitamines. A titre
indicatif, l'apport moyen se situe à:
· 2600 Kcal, en dépassement de 20% par rapport aux besoins recommandés;
· 53 g de protéines, en hausse de 45% par rapport au niveau recommandé.
I1 n'en demeure pas moins que cette situation comporte quelques déséquilibres
liés à la faible part des protéines animales, aux carences en quelques
oligo-éléments (calcium, iode et fer) et en certaines vitamines (B2, A et D).
Selon plusieurs enquêtes récentes du Ministère de la Santé, la prévalence des
carences en nutriments (minéraux et vitamines) est alarmante; 41% des enfants
sont carencés en vitamine A et neuf femmes sur dix sont carencées en fer.
En outre, le modèle actuel de consommation est caractérisé par des apports
limités en denrées d'origine animale (lait et produits laitiers). Cette
situation se traduit par un déséquilibre nutritionnel de la ration alimentaire,
qu'il y a lieu de corriger, comme le montre le tableau suivant:
Indicateurs
d'équilibre |
Nombre
d'équilibre |
Situation
actuelle |
Situation à
l'horizon 2020 |
Energie
glucidique sur énergie totale |
50-65% |
70% |
65% |
Energie
protéinique sur énergie totale |
13-15% |
11,3% |
13% |
Energie
lipidique sur énergie totale |
20-30% |
19% |
20% |
Protéines
d'origine animale sur protéines totales |
25% (*) |
19% (*) |
25% |
Calcium sur phosphore |
50-150% |
20% |
40% |
(*) :y compris
la contribution des produits halieutiques. |
Une étude réalisée récemment par le Ministère de l'Agriculture a évalué la
demande et l'offre des produits alimentaires de base à l'horizon 2020.
La demande alimentaire par personne et par an, a été estimée sur la base de
deux hypothèses:
· L'hypothèse tendancielle ;
· L'hypothèse nutritionnelle.
L'évaluation de la demande totale s'appuie sur une estimation de la population
de l'ordre de 40 millions d'habitants à l'horizon 2020.
La demande tendancielle s'appuie sur les estimations découlant des fonctions de
demande élaborées à partir des données de la période 1969?1990 et des évolutions
attendues des variables socio?économiques prises en compte (croissance moyenne
du PIB de 4,5 % par an, évolution tendancielle des prix …).
La demande nutritionnelle s'appuie sur une ration nutritionnelle à moindre coût
et sur la base d'une meilleure adéquation entre les apports nutritionnels de la
ration alimentaire et ses exigences qualitatives et quantitatives.
Les niveaux de demande déterminés impliqueront une offre additionnelle à
réaliser par le système de production à travers la mobilisation du potentiel
productif par produit et par zone agro-pédologique, ainsi que l'intensification
de la production végétale et animale.
La confrontation de la demande actuelle et celles prévues à l'horizon 2020,
permet de relever les écarts suivants:
|
Demande actuelle (A) |
Demande à
l'horizon 2020 |
B/A en % |
C/A en % |
|
Hypothèse nutritionnelle (B) |
Hypothèse tendancielle (C) |
||||
Céréales |
8.200 |
12.400 |
13.700 |
151 |
167 |
Sucre |
760 |
960 |
1.180 |
118 |
155 |
Huiles |
270 |
600 |
500 |
222 |
185 |
Viandes rouges |
340 |
400 |
500 |
117 |
147 |
Viandes blanches |
150 |
300 |
270 |
200 |
180 |
Lait |
1.140 |
3.700 |
2.000 |
324 |
175 |
Œuf |
1.400 |
3.300 |
2.100 |
236 |
150 |
Beurre |
40 |
120 |
70 |
300 |
175 |
S'agissant des céréales, les objectifs de production fixés consistent à
réaliser dans une première phase le plan de sécurisation de la production
céréalière à 60 millions de quintaux sur une superficie de 4,30 Millions
d'hectares localisées dans les zones irrigués et de bour favorable.
L'objectif à long terme étant d'augmenter le taux de couverture des besoins en
blé tendre de 52% actuellement à 70% et la consolidation des niveaux actuels
pour les autres céréales, à savoir 80% pour le blé dur, 90% pour l'orge et 30%
pour le mais. Dans ce cadre, un plan d'action a été arrêté et concerne les
domaines afférents au financement et à l'assurance agricole, à la mécanisation
des travaux agricoles, à l'irrigation de complément, à la formation, à la
sensibilisation et à l'encadrement technique ainsi qu'à l'utilisation des
intrants et à la commercialisation des productions.
Concernant la filière sucrière, l'objectif fixé à long terme consiste à
consolider les acquis réalisés en matière de sécurité alimentaire, et ce dans
le cadre d'une filière intégrée et efficiente, en tenant compte des
potentialités offertes en matière de superficies aménagées dans le cadre du
Programme National d'irrigation et des gains de productivité. Ainsi, la
production attendue en sucre à l'horizon 2020, soit 970.000 T, permettrait la
couverture de près de 76% des besoins de consommation, exprimés selon la
demande tendancielle.
S'agissant des huiles, la stratégie élaborée à long terme vise la relance du
secteur des oléagineux, notamment à travers l'extension des superficies en
irrigué et l'amélioration des contextes technique et organisationnel de la
production. Pour les huiles d'olives, le plan National Oléicole a prévu
l'extension des superficies de 500.000 Ha environ et un doublement de la
productivité. Ainsi, la production des huiles d'olives et des graines s'élèvera
à l'horizon 2020 à 470.000 T, soit 77% des besoins de consommation. La
réalisation de cet objectif demeure étroitement liée au développement du
secteur oléicole.
Pour les fruits et légumes, les objectifs fixés tablent sur des productions
respectives de 7 millions de tonnes dont 1,85 millions de tonnes d'agrumes et
420.000T de vignes de raisins. Ces productions permettront de couvrir la
totalité des besoins intérieurs, et de dégager des excédents exportables.
Concernant la production laitière, et selon les études prospectives réalisées
en la matière, elle devrait connaître un rythme d'accroissement de près de 9,2
% par an pour garantir la sécurité alimentaire totale en produits laitiers,
selon l'option nutritionnelle jusqu'à l'horizon 2010; ce qui nécessite la mise
en place d'une stratégie axée notamment sur l'incitation à l'investissement
pour l'intensification de la production, qui privilégiera les zones à vocation
laitière (zones irriguée et bour favorable) et portera, entre autres, sur les
exonérations fiscales pour l'acquisition et l'importation des facteurs de production,
l'octroi des aides financières à l'investissement, l'appui aux organisations
professionnelles (partenariat...), la mise à niveau des producteurs (formation,
encadrement rapproché ...) et enfin l'amélioration de la qualité du lait à tous
les maillons de la filière.
Pour les viandes rouges, les perspectives de consommation projetées sur la base
des indicateurs socio?économiques laissent présager un taux d'accroissement de
la production de 2,4% par an jusqu'à l'horizon 2010. Cet objectif, serait
atteint grâce à la mise en place d'un programme global visant l'amélioration de
la productivité du cheptel et de la qualité des produits carnés, l'organisation
des producteurs et du marché, et l'incitation des organisations
professionnelles et des privés à l'intensification de la production des viandes
rouges (aides financières, exonérations fiscales …). Dans ce cadre, des
associations de producteurs de viandes rouges ont été constituées au niveau
régional et national dont l'une des missions est la mise en place d'un
programme intensif d'engraissement, l'organisation du marché de viandes, la
formation et la mise à niveau des producteurs.
D'une manière générale, il est possible de consolider les résultats obtenus
ainsi que leur amélioration, en particulier pour les productions issues des
zones irriguées. Toutefois, les niveaux de sécurité alimentaire, demeurent
tributaires des évolutions que connaîtront les marchés mondiaux et le degré de
leur ouverture pour permettre aux pays en développement de valoriser leurs avantages
comparatifs.
IV? STRATEGIE DE LA SECURITE ALIMENTAIRE AU MAROC
L'évaluation des réalisations en matière de sécurité alimentaire montre que le
Maroc, a franchi des étapes importantes qui l'ont conduit à adopter une
approche intégrée visant à la fois à assurer l'approvisionnement régulier du
pays en produits agricoles et halieutiques et à s'ouvrir sur l'économie
mondiale.
Les acquis obtenus sont un atout précieux pour faire face aux défis de
croissance que le Maroc aura à confronter au cours des prochaines décennies du
fait de l'évolution prévisible de sa démographie, de la détérioration
progressive de ses ressources naturelles sol et eau notamment, et enfin de la
dynamique de la conjoncture internationale et l'ouverture de l'agriculture
nationale sur les marchés extérieurs.
A ce titre, il convient de signaler l'existence d'un certain nombre de défis
qu'il y a lieu de surmonter dans les années à venir pour assurer la
disponibilité et l'accès des populations à une alimentation équilibrée et
saine.
Ces défis concernent principalement:
· La lutte contre la pauvreté.
· La stabilité de la production nationale.
1. LUTTE CONTRE LA PAUVRETE
Les objectifs visés sont les suivants:
· Sur le plan économique : créer la richesse et l'emploi et leur répartition
pour une population jeune et appelée à s'accroître, en mettant les moyens et
les mesures appropriés à même de réduire l'ampleur de ce fléau ;
· Sur le plan social: renforcer les politiques alimentaires, à travers des
actions de solidarité avec les couches les plus démunies, en mettant en place
des instruments d'aide alimentaire structurels et pérennes, à l'instar de ce
qui se passe aux USA (Food Stamp) et en France (Restaurants de Cœur). A ce
titre, la Fondation Mohammed V pour la Solidarité, présidée par Sa Majesté le
Roi Mohammed VI, constitue la base de cette nouvelle politique.
2. STABILITE DE LA PRODUCTION NATIONALE.
Ce défi majeur ne pourra être totalement relevé que dans le cadre d'une
stratégie agricole et rurale fondée sur une appréciation objective des
contraintes et des marges de progrès de l'agriculture nationale dans le cadre
d'un développement économique et social global mettant l'accent sur le
développement agricole et rural, d'une part, et sécurisant un niveau minimum de
la production alimentaire nationale et créant un niveau de richesse suffisant
pour permettre de répondre aux besoins d'importation, de stockage, de transport
et de distribution des denrées alimentaires, d'autre part.
A ce titre, le Ministère de l'Agriculture, du Développement Rural et des Eaux
et Forêts a élaboré une stratégie de développement agricole et rural à long
terme. Le colloque National de l'Agriculture et du Développement Rural, tenu à
Rabat les 19 et 20 Juillet 2000, a associé, l'ensemble des acteurs concernés de
notre société pour débattre des contours et du bien-fondé de cette nouvelle
stratégie et se concerter pour une agriculture productive, compétitive et
durable. L'élaboration de cette stratégie a coïncidé avec la préparation du
Plan Quinquennal 2000-2004, et s'est fixé comme objectifs prioritaires:
· De réduire la vulnérabilité à la sécheresse et à la détérioration des
ressources naturelles de base;
· D'accroître les performances de production et l'efficience économique;
d'augmenter l'emploi et les revenus dans l'agriculture;
· D'améliorer les niveaux de l'éducation et de la formation professionnelle des
hommes et des femmes rurales;
· De corriger les équilibres régionaux et sous-régionaux en matière
d'infrastructures, de commerce et d'aménagement du territoire.
La réalisation de ces objectifs permettra à notre agriculture d'améliorer sa
compétitivité et contribuer ainsi à la réalisation de la sécurité alimentaire
dans des conditions économiques efficientes.
Pour la mise en œuvre de la stratégie précitée, un certain nombre de facteurs
demeurent déterminants pour le développement de la production et de la
consommation des produits alimentaires, il s'agit de:
2.1. Utilisation de l'espace agricole
Selon les résultats du Recensement Général de l'Agriculture, réalisé en 1996,
sur une superficie globale de 71 Millions Ha, la SAU couvre 8,7 Millions Ha
dont 1 Million Ha, irrigués sur un potentiel irrigable de façon pérenne de 1,6
Million Ha.
Entre 1974 et 1996, la SAU a augmenté de 1,5 Million Ha; cette tendance peut
difficilement se poursuivre à l'avenir. Par contre, les superficies irriguées
pourront s'accroître de 350.000 Ha pour atteindre le potentiel irrigable de
façon pérenne. Les superficies consacrées à la production des principales
cultures et leur répartition entre l'irrigué, le bour favorable et le bour
défavorable ont d'importantes répercussions sur la sécurité alimentaire. Il en
est de même de l'intensification de l'utilisation des superficies (réduction de
la jachère) et de l'extension des superficies récoltées (plusieurs récoltes par
an).
Utilisation de la SAU en 1000 Ha |
||||
|
Irrigué |
B.Favorable |
B. défavorable |
Total |
Céréales |
740 |
2.350 |
2.480 |
5.300 |
Légumineuses |
20 |
350 |
50 |
420 |
Fourrages |
150 |
200 |
- |
350 |
Maraîchage |
130 |
100 |
- |
230 |
Arboriculture |
485 |
317 |
- |
802 |
C.Industrielles |
84 |
112 |
- |
196 |
D.Divers |
12 |
99 |
- |
110 |
E.Jachère |
- |
421 |
- |
110 |
Total |
1.351 |
3.949 |
3.881 |
9.181 |
2.2. Gestion de l'aléa climatique
La production nationale de produits de base fait l'objet de fluctuations
inter-annuelles très marquées à cause des sécheresses de plus en plus
fréquentes durant les deux dernières décennies. Ces fluctuations accentuent la
précarité des populations rurales, aggravent les importations et se répercutent
sur le taux de croissance de l'économie nationale. Face à cette situation et étant
donné l'importance des céréales dans l'alimentation des ménages marocains, il
est devenu indispensable de sécuriser un niveau de production céréalière
dépassant largement celui obtenu actuellement en année difficile. A ce titre,
le Ministère de l'Agriculture, du Développement Rural et des Eaux et Forêts a
élaboré un programme de sécurisation de la production céréalière à un niveau de
60 millions de qx dont la réalisation s'étalera sur une période de 3 ans. En
parallèle à ce programme, le Ministère a mis en place un Observatoire National
de la Sécheresse, dont l'objectif principal est d'apporter, à travers une
collecte méthodique et continue des données, une aide à la prise de décision en
matière des actions à entreprendre et d'élaborer les informations requises en
temps opportun pour l'évaluation de l'impact des différentes mesures de lutte
en vue de prévenir et d'atténuer les effets de la sécheresse.
2.3. Irrigation et valorisation de l'eau
La superficie irrigable totale du Maroc s'élève à 1,6 millions d'hectares, ce
qui représente 17% de la superficie agricole utile du pays. La superficie qui
peut être irriguée de façon pérenne est de 1,3 millions d'hectares et celle
dominée par les eaux de crues est de 300.000 hectares.
Actuellement, 1 million d'hectares est déjà équipé et participe de façon
importante à la production agricole nationale. C'est ainsi que la valeur
ajoutée engendrée par le sous-secteur de l'irrigation représente 35 % de la
valeur ajoutée agricole en bonne année et 70% en année de sécheresse. Ce
caractère sécurisant de l'irrigation est encore plus marqué pour les
productions qui nécessitent des apports importants en eau.
Le secteur de l'irrigation joue également un rôle capital dans l'apport de
devises par les exportations. En effet, les cultures irriguées participent à
plus de 75% dans les exportations agricoles, soit près de 5 milliards de
Dirhams.
L'irrigation des terres a permis, en plus de la création de près de 600.000
emplois permanents, l'amélioration des revenus des agriculteurs. Dans les
Doukkala, les revenus ont été multipliés par 5 à 8 fois et dans la Moulouya,
par 4 a 6 fois.
L'irrigation participe donc à plus d'un titre à la sécurité alimentaire à
travers la croissance des productions et leur stabilité dans le temps, à
travers l'apport de devises qu'elle engendre et à travers les revenus dont elle
permet la distribution. Le tableau suivant donne le taux de participation de la
production du secteur irrigué dans la production nationale (en %)
Cultures |
Année pluvieuse (1995/96) |
Année de sécheresse (1994/95) |
||
% Superficie |
% Production |
% Superficie |
% Production |
|
Céréales |
9 |
11 |
12 |
60 |
Légumineuses
alimentaires |
6 |
18 |
10 |
24 |
Fourrages |
50 |
67 |
70 |
91 |
Cultures
sucrières |
93 |
94 |
96 |
98 |
Oléagineux |
5,5 |
11,2 |
8,5 |
18 |
Arboriculture |
47 |
88,7 |
47 |
90 |
(Agrumes) |
(100) |
(100) |
(100) |
(100) |
Maraîchage |
58 |
71 |
70 |
87 |
(primeurs) |
(100) |
(100) |
(100) |
(100) |
Lait |
- |
75 |
- |
75 |
Viandes |
- |
26 |
- |
-26 |
L'importance de la production assurée par les superficies irriguées en année de
sécheresse, montre que l'irrigation représente le facteur important de la
sécurité alimentaire. En effet, à l'exception des légumineuses alimentaires et
des oléagineux, la participation du secteur irrigué dans les différentes
productions végétales est déterminante.
La superficie réservée aux céréales en irrigué s'est située en moyenne jusqu'à
1999 autour de 250.000Ha, correspondant à une production de 6,25 millions de
quintaux. Cependant, dans le cadre du programme de sécurisation des céréales
entamé à partir de la campagne 1999/2000, cette superficie sera de 300.000 Ha.
Elle assurera avec un doublement des rendements, une production de 15 millions
de quintaux.
Les primeurs et agrumes qui forment l'assiette d'exportation des produits
agricoles proviennent exclusivement de l'irrigué.
En année de forte sécheresse, la participation du secteur irrigué devient
capitale et contribue significativement à la satisfaction des besoins du pays
en produits agricoles.
Il est à noter que le secteur irrigué participe également à la satisfaction des
besoins nationaux en semences sélectionnées, notamment les céréales et la pomme
de terre dont la production est conduite exclusivement en irrigué.
Les sécheresses successives qui ont sévi durant les deux dernières décennies
laissent penser que le déficit pluviométrique est une donnée structurelle de
notre pays. Il s'en suit que le sous-secteur irrigué aura un rôle de plus en
plus important pour une plus grande participation à la sécurité alimentaire et
subvenir aux besoins de plus en plus pressants et importants, en quantité et en
qualité, des exportations marocaines. Ce sous-secteur est donc appelé à
produire plus et mieux, avec la même quantité d'eau disponible, sinon avec
moins, et ce, tout en préservant le patrimoine productif comprenant aussi bien
le milieu (la terre avec sa fertilité et sa viabilité) que le principal facteur
de production qui est l'eau d'irrigation (disponibilité de la ressource,
viabilité des réseaux de transport et de distribution).
L'analyse des réalisations des cinq dernières années en matière de superficies
cultivées montre une intensification de la production puisque le taux
d'intensification cultural (rapport des superficies totales équipées et
cultivées) ne dépasse guère les 100% pour l'ensemble des 9 grands périmètres
irrigués du Maroc. Le taux prévu initialement était en moyenne de 120%.
Les niveaux de valorisation de l'eau d'irrigation sont très variables d'un
périmètre à l'autre. La valeur de la production par m3 d'eau d'irrigation
consommée est de 22 Dh/m3 dans le périmètre du Sous-Massa et n'est que de 1,7
Dh/m3 dans le Loukkos. La moyenne des Grands Périmètres irrigués est de 2,8
Dh/m3.
La valorisation de l'eau d'irrigation, notamment par les productions végétales
constitue un exemple concret qu'il est important d'analyser afin d'en tirer les
enseignements utiles pour une redéfinition de la politique agricole dans le
sous-secteur de l'irrigué.
Les productions végétales valorisent différemment le m3 d'eau d'irrigation. Les
primeurs sont les plus valorisantes avec une valeur de production de 22 Dh/m3,
dont 10,6 Dh/m3 de valeur ajoutée et 11,4 Dh/m3 de consommations
intermédiaires. Toutes les autres cultures ne dépassent guère 3 Dh/m3 de valeur
de production ou 1,7 Dh/m3 de valeur ajoutée.
En matière de création d'emploi, les productions végétales permettent de créer
en moyenne 13 journées de travail par 1.000 m3 d'eau d'irrigation consommée.
Les niveaux des rendements sont tellement variables entre les différents
périmètres irrigués qui peuvent aller du simple au double. A titre d'exemple,
le rendement de la betterave est de 35 T/Ha dans le Gharb et de 60 T/Ha dans
les Doukkala. Ceci pose la problématique du développement régional d'une part,
et des opportunités de spécialisation dans les domaines d'excellence par
périmètre, d'autre part.
Les niveaux de rendement constatés sont très liés à la qualité du service de
l'eau. Dans les périmètres disposant de ressources limités ou offrant une
gestion peu performante de ces ressources (lourd système de gestion, problèmes
de concordance entre l'offre et la demande, problème de coût et de
tarification), on enregistre les performances les plus faibles.
2.4. Valorisation des ressources en terres et territorialisation
Les enseignements tirés des expériences vécues en matière de projets intégrés
et d'aménagement des zones bour ont permis d'élaborer et de mettre en œuvre à
partir de 1995, la Loi 33?94 relative aux périmètres de mise en valeur en bour.
D'une importance majeure pour les zones d'agriculture pluviale, cette loi a
institué le cadre légal d'intervention et a défini les lignes directrices de la
nouvelle stratégie de mise en valeur en bour. Cette nouvelle stratégie vise
particulièrement un rééquilibrage entre le bour et l'i1Tigué et la réunion de
toutes les conditions permettant aux zones d'agriculture pluviale d'exprimer
pleinement leur potentiel de production.
Elle vise aussi la création dans ces zones de pôles de développement agricole
et rural intégrés et durables à travers une approche basée sur les cinq
principes suivants :
· Une approche intégrée rompant avec le modèle d'intervention sectorielle, et
prenant en compte l'ensemble des opérations de développement agricole
susceptibles d'introduire une intensification de la mise en valeur des terres
et un accroissement de l'investissement au niveau des exploitations ;
· Une approche focalisée et territorialement localisée des interventions visant
à mieux cibler les actions et à répondre aux spécificités spatiales et sociales
de chaque zone ;
· Une approche participative à tous les stades de la conception et de la
réalisation, des projets, à même de garantir l'adhésion des agriculteurs
concernés aux actions à mener et leur participation à leur réalisation ;
· Une approche contractuelle faisant ressortir les droits et obligations des
agriculteurs bénéficiaires ;
· Une approche déconcentrée du pouvoir de décision et de mobilisation des
moyens nécessaires, permettant aux structures régionales et locales de
concevoir et réaliser des programmes adaptés aux besoins réels.
Cette approche intègre des actions d'aménagements, de réalisation
d'infrastructures et de développement de productions, adaptées aux
potentialités des différents espaces.
En outre et dans le cadre de la stratégie 2020 de développement rural, préparée
par le Ministère de l'Agriculture, du Développement Rural et des Eaux et Forêt,
les interventions de ce Ministère, seront adaptées régionalement aux
spécificités zonales et à la diversité des stratégies locales.
La térritorialisation constituera, alors, la nouvelle approche essentielle de
la nouvelle stratégie de développement agricole et rural car elle permet de
répondre à trois préoccupations majeures:
· L'intégration : elle se comprend de deux façons, verticalement lorsqu'il
s'agit des politiques de filières, et horizontalement lorsqu'il s'agit de
répondre aux besoins interdépendants qui caractérisent les systèmes de
production ;
· L'adaptation des politiques agricoles aux potentialités et contraintes du
milieu naturel ainsi qu'aux systèmes de production et à leur environnement
humain ;
· La décentralisation, à travers la création d'outils régionalisés d'aide à la
décision.
La définition des niveaux de territorialisation se fonde sur le concept de
"vocation dominante" qui tient compte du potentiel agro-écologique,
des aptitudes biophysiques du milieu, du poids relatif et des caractéristiques
des différentes productions, des principaux systèmes de production, des
possibilités d'écoulement des productions,
Ainsi, le premier niveau de territorialisation est relatif aux grands ensembles
agro-écologiques, tels que le bour aléatoire, le bour favorable, les zones de
montagne, les steppes pastorales arides ou zones pré-sahariennes et
sahariennes.
La territorialisation se base également sur la définition au sein de ces
ensembles d'autres niveaux de répartition du territoire permettant de mieux
déterminer les orientations stratégiques relatives aux programmes de
développement local et aux projets d'investissement. Il s'agit d' "Unités
de Territorialisation Agricole " (UTA) qui correspondent à des unités géographiques
présentant un certain nombre de grands caractères communs qui les distinguent
des unités voisines.
Il y a lieu de souligner, par ailleurs, que des territorialisations
sectorielles peuvent être envisagées, telles que celles relatives à la
modélisation de l'élevage, à la stratégie des parcours, à la stratégie de
sécurisation de la production des céréales, …. Il est également possible de
distinguer des espaces à des niveaux plus bas, que la Stratégie de
Développement Rural 2020; a qualifié de " petites régions rurales "
ou " pays " et qui permettent de mieux cibler les actions de
développement local.
Enfin, il convient de souligner que la territorialisation agricole, qui répond
à des critères liés à la localisation géographique, au milieu biophysique et
aux systèmes de production, ne coïncide pas obligatoirement avec le découpage
administratif.
Les critères de répartition concernent le relief, le climat, le facteur sol et
l'apport d'eau d'irrigation. Sur la base de ces critères, la territorialisation
de l'agriculture marocaine a permis de dégager neuf ensembles agro-écologiques
répartis entre 31 UTA.
La territorialisation de l'agriculture devrait aboutir à l'identification des
choix et des priorités qui permettront aux diverses unités spatiales du pays de
se développer, en tenant compte de leurs contraintes, de leur potentiel et de
leurs vocations dominantes. Ces choix et priorités se déclinent eux-mêmes en
matière de gestion de la sécheresse, d'augmentation de la productivité selon
les politiques des filières de production, de développement et de réduction de
la marginalisation des zones de montagne et des zones frontalières à vocation
pastorale et oasienne.
La territorialisation des politiques agricoles montre que certaines zones sont
plus vulnérables que d'autres, à la fois en raison de leur situation
agro-climatique, de l'importance de l'agriculture dans l'espace rural et de
l'importance de la population agricole concernée.
Partant de ces éléments, c'est l'ensemble agro-écologique " bour aléatoire
" qui est le plus concerné. Les UTA de cet ensemble doivent en priorité
bénéficier des extensions de l'irrigation ainsi que des programmes d'irrigation
de complément et des techniques de récupération des eaux de ruissellement. Ces
UTA doivent aussi profiter des progrès réalisés en aridoculture. On doit aussi
penser à y instaurer une arboriculture adaptée à la semi-aridité (amandier,
pistachier, arganier).
Le choix de cet ensemble agro-écologique en priorité découle de la stratégie du
pays visant une bonne gestion de la sécheresse.
En ce qui concerne l'ensemble agro-écologique "bour favorable", il
est en seconde place, compte tenu de la superficie qu'occupe l'agriculture. Cet
ensemble est celui où les politiques de diversification des productions et
d'augmentation de la productivité peuvent avoir leur plus grand impact.
Néanmoins, ces zones sont également soumises à des risques de sécheresse d'où
l'importance de l'irrigation de complément et celle de récupération des eaux de
ruissellement.
En ce qui concerne les montagnes, la politique de développement ne peut être
que partiellement fondée sur l'agriculture. La priorité est de revégètaliser
les espaces dégradés afin de restaurer un cycle d'eau régularisé et durable.
L'option technique à long terme qui est généralement choisie est celle du
reboisement, notamment les superficies du domaine forestier, à conjuguer avec
une bonne gestion des parcours.
Dans les zones oasiennes et frontalières, une politique bien orientée devrait
aider les éleveurs moyens à constituer une catégorie d'entrepreneurs d'élevage
compétitifs.
2.5. Développement des filières de production
L'adaptation de l'agriculture aux enjeux internes et externes du développement
appelle une production accrue, diversifiée et compétitive en terme de prix et
de qualité. Cette production doit se faire dans un contexte économique plus
compétitif et sur des bases qui permettent une affectation efficiente des
ressources rares (terre, eau et capital) ainsi que la protection du milieu et
de l'environnement.
Faire face à de tels enjeux suppose que l'on soit en mesure de bien moduler les
politiques de production et de réponse à la demande. I1 est ainsi nécessaire de
promouvoir une approche intégrée de mise à niveau de l'agriculture marocaine en
matière de production, de transformation, de commercialisation et de
distribution afin de l'engager, de façon compétitive, dans un processus de
transition vers une économie ouverte sur le marché.
Les impératifs à cet égard sont, en particulier, de concilier le renforcement
de la sécurité alimentaire avec l'accroissement des exportations.
Le développement des productions agricoles devra être conçu dans le cadre
d'approches stratégiques de filière. En entend par filière, l'ensemble des
activités productrices qui, de l'amont à l'aval, alimentent un marché
déterminé. C'est ainsi, que sont distinguées les filières céréalières,
sucrière, oléicole, agrumicole, laitière, viandes,...
Les performances des différents secteurs sur les marchés intérieurs et
extérieurs sont exprimés en terme de marge bénéficiaire, construite, en premier
lieu, par le renforcement des liens entre les segments de la filière
(production, transformation et distribution) et par l'élaboration de stratégie
concertées en ce qui concerne les relations en amont avec les fournisseurs de produits
et services, et en aval avec les marchés de destination des produits de la
filière. Cette concertation devrait donner lieu le plus souvent à l'émergence
d'associations interprofessionnelles ayant un rôle décisif à jouer dans la
restructuration du tissu productif et son adaptation aux nouvelles exigences du
marché.
La filière est aussi un espace de choix pour l'appréciation objective des
conflits qui surgissent entre les acteurs intervenant sur les différents
segments de la filière et entre ces acteurs et les opérateurs en amont et en
aval de la filière. Ces conflits portent souvent sur les conditions de
formation et/ou de répartition de la marge bénéficiaire consacrant la
performance d'une filière. Ainsi, les prix régissant les marchés des facteurs et
des produits constituent un élément déterminant dans la formation de la marge
bénéficiaire totale, alors que les comportements des acteurs de la filière
conditionnent les modalités selon lesquelles cette même marge est répartie.
L'utilisation de la filière agroalimentaire comme instrument d'analyse et
d'aide à la décision doit être étendue, dans le contexte marocain, aux
ressources naturelles utilisées par l'agriculture. L'intégration de ces données
permet en effet de restituer des ressources, comme les parcours, dans leur
environnement économique. La prise en compte de l'environnement social permet
quant à lui d'éviter que la recherche de la plus grande rentabilité se traduise
par des effets d'exclusion sociale.
Une analyse des interactions entre les différentes filières de production
agricole est nécessaire, vu la compétition entre elle pour les mêmes ressources
rares (terres, eau d'irrigation, investissement, budget alloué à la recherche
et à l'encadrement technique, etc,...). Les politiques dans l'une des filières
peuvent avoir, directement ou indirectement, un impact négatif ou positif sur
le développement d'autres filières, selon les rapports de complémentarité ou de
compétition qui existent entre elles.
Dans ce cadre, des Plans de développement des différentes filières de
production, végétale et animale ont été élaborés à l'horizon 2020. il s'agit du
plan national oléicole, du programme de sécurisation de la production
céréalière, du programme de réhabilitation du secteur des légumineuses
alimentaires, du programme de restructuration et de développement de la
palmeraie, du plan national agrumicole, du plan sucrier, du plan laitier, du
plan des viandes rouges, du plan des viandes blanches. Ces plans visent la mise
à niveau de ces filières pour les rendre plus compétitives.
Ces plans se basent sur l'accroissement de la production en fonction des
potentialités naturelles et des possibilités d'amélioration de la productivité
et de l'efficience économique ainsi que la capacité de faire face à la
concurrence étrangère dans le cadre de la mondialisation. En outre, ces plans
fixent comme objectif, la nécessité de garantir la sécurité alimentaire des
produits s'y rapportant.
2.6. Protection de l'environnement et de sa durabilité.
La sécurité alimentaire durable est de plus en plus menacée par la dégradation
des ressources naturelles (terre, eau, ...) engendrée par les activités
humaines liées à l'agriculture (intensification de la production et sa
valorisation : utilisation d'engrais et de produits chimiques, rejets des
industries agroalimentaires ...), à l'industrie (rejet des gaz à effets de
serres et changements climatiques, pollution des eaux ...) et à l'urbanisation
(croissance démographique) et ses conséquences sur la limitation des terres à
usage agricole et de l'eau. En ce qui concerne le facteur terre, et dans les
zones à écologie fragile telles que les zones de montagne par exemple, la
pression sur la terre se traduit par la déforestation en tant que seule
alternative au maintien du revenu (en l'absence d'autres activités
extra-agricoles), ce qui génère l'érosion et le risque d'envasement des
barrages en plaines.
Par ailleurs, l'intensification non raisonnée de la production dans les zones
irriguées se traduit par la dégradation des terres, ce qui réduit le rendement
et menace la fertilité des sols.
L'utilisation par l'agriculture des produits chimiques et des engrais, les
rejets des usines industrielles et des agglomérations urbaines constituent des
sources importantes de pollution des eaux souterraines et superficielles.
Le Maroc se situe dans une zone climatique aride, l'ensemble de ces changements
affecte négativement le biotope, en accentuant les phénomènes de sécheresse et
de détérioration du couvert végétal.
La stratégie de développement rural et agricole, élaborée par le Ministère de
l'Agriculture, du Développement Rural et des Eaux et Forêts, vise la recherche
d'un équilibre entre les activités agricoles et humaines (sécurité alimentaire)
et la préservation des ressources naturelles, seule garantie d'un développement
durable.
Dans les terroirs pauvres où l'érosion bat sont plein, l'effort de la
collectivité sera dominant. C'est le cas des parcours ou de certains bassins
versants. La mise en jeu des ressources de la collectivité s'appuie sur le fait
que non seulement les terroirs difficiles ne peuvent générer les moyens
financiers suffisants mais qu'ils jouent un rôle de régulation économique ou
géographique dont bénéficient d'autres régions.
Lutter contre l'érosion dans les bassins versants, c'est limiter l'envasement
des barrages et donc maintenir un niveau de production dans les périmètres
Lutter contre le surpâturage dans les parcours c'est préserver une frange de la
population de l'exode rural et maintenir un capital de production en viande
ovine à un coût réduit.
Dans ce cadre, la stratégie du développement agricole, a fixé comme objectifs,
la création d'un équilibre entre les activités agricoles et humaines ainsi que
la convention des ressources naturelles qui constitue la base d'un
développement durable.
2.7. Croissance démographique
La croissance des disponibilités alimentaires devra être au moins égale à celle
de la démographie, de sorte que les disponibilités par habitant ne diminuent
pas. Si l'on considère la nécessité de contrôler la croissance des importations
alimentaires, cela reviendrait à dire qu'il faudra freiner la croissance
démographique et/ou améliorer la productivité et l'étendue de la SAU par
Habitant.
Toute amélioration des disponibilités alimentaires parallèlement à un contrôle
de la croissance des importations alimentaires nécessitera une forte
amélioration du niveau de la production nationale. D'autres paramètres jouent
un facteur déterminant de la sécurité alimentaire, notamment la pyramide des
âges, le taux de fécondité et l'augmentation de la population des villes comme
conséquence d'un double effet de démographie et d'exode rural vers les villes.
2.8. Développement des ressources humaines et promotion des investissements
a) Recherche et formation.
La recherche agronomique constitue l'un des piliers du développement agricole.
Le Maroc a pu se doter d'institutions dynamiques et d'une politique de
recherche qui lui a permis de couvrir de larges domaines et d'obtenir des
résultats intéressants, particulièrement pour les productions stratégiques.
Concernant les céréales, la quasi totalité des variétés inscrites au catalogue
officiel ont été obtenues par l'Institut National de la Recherche Agronomique
(INRA). Parmi les acquis importants dans ce domaine, il convient de signaler la
sélection de plus de 169 variétés de différentes espèces à intérêt
agro-économique, adaptées aux différents terroirs et qui donnent de hauts
rendements. Pour l'olivier et le palmier dattier, plusieurs clones productifs
et résistants aux maladies et parasites ont été obtenus.
Actuellement, des expérimentations sont menées pour mettre au point de
nouvelles variétés selon la méthode dite des "Organismes Génétiquement
Modifiés", qui peuvent donner des rendements encore plus élevés. Des
méthodes plus performantes, telle que la multiplication par voie
méristématique, sont également utilisées pour les cultures horticoles et
arboricoles.
Grâce à leur potentiel humain et à leur répartition géographique, les
institutions de recherche ont pu réaliser des résultats qui leur confèrent une
notoriété internationale.
Cependant, les moyens mobilisés pour la recherche agronomique demeurent en deçà
des besoins. Dans ce cadre, l'engagement de l'Etat pour le soutien de la
recherche agronomique est primordial pour l'acquisition et l'utilisation de
nouvelles technologies.
A cet effet, pour notre pays ne consacre actuellement à la recherche que 0,25%
du produit intérieur brut agricole, et il est attendu que ce taux augmente à
1,25% à l'horizon 2015 et que l'objectif fixé à long terme est de 5%.
La formation agricole constitue le deuxième pilier du développement agricole.
Des cadres de différents niveaux, couvrant tous les domaines d'activités, sont
formés pour satisfaire les besoins de tous les secteurs agricoles et
para-agricoles. La politique dans ce domaine, a conduit à la mise en place d'un
d'important réseau d'établissements de formation constitué :
· De trois établissements d'enseignement supérieur d'une capacité d'accueil de
2.800 places. I1 s'agit de l'Institut Agronomique et Vétérinaire HASSAN II de
Rabat et de son Complexe Horticole d'Agadir, de l'Ecole Nationale d'Agriculture
de Meknès et de l'Ecole Nationale Forestière d'Ingénieurs de Salé.
· D'un dispositif d'enseignement technique et de formation professionnelle
agricole constitué de 43 établissements avec une capacité d'accueil de 3.200
places.
Dans ce domaine, les établissements marocains ont acquis un rayonnement
international au point qu'ils forment en leur sein des ingénieurs et des
techniciens venant de divers horizons et particulièrement des pays d'Afrique.
b) Investissements agricoles et soutien des petites et moyenne exploitations
Au Maroc, les petites et moyennes exploitations, c'est-à-dire celles dont la
SAU est inférieure à 5 Ha représentent 70 % des exploitations et celles dont la
SAU est comprise entre 5 et 20 hectares représentent 25 % des effectifs. Elles
exploitent respectivement 24 et 43 % de la SAU. C'est dire que toute
amélioration notable des productions agricoles devra nécessairement prévoir des
aides et des incitations à l'investissement au profit des petites et moyennes
exploitations.
Vu le caractère familial des petites et moyennes exploitations et leur faible
organisation, celles-ci profitent faiblement des avantages offerts par l'Etat
et ce d'autant plus que la politique de libéralisation leur est largement
défavorable.
L'augmentation des investissements agricoles garantie une stabilisation des
revenus des exploitations et favorise l'instauration de mécanismes d'assurance
et autres systèmes pour stabiliser les revenus des agriculteurs et réduire les
effets néfastes des aléas climatiques.
c) Valorisation de la production agricole et normalisation.
La commercialisation, la transformation et la distribution des produits
alimentaires représentent une part importante du prix à la consommation et
contribuent pour beaucoup à l'emploi et au revenu d'un pays. Une filière
efficace de transformation après-récolte et de commercialisation, oriente la
production et la distribution en fonction des besoins des consommateurs et
réduit au minimum les coûts du transfert entre producteur et consommateur. Une
commercialisation efficace, garantit les disponibilités alimentaires et
facilite l'accès à une nourriture bon marché, mais saine.
Avec la libéralisation, la globalisation de l'économie et l'ouverture du marché
intérieur aux produits agricoles provenant des pays tiers, le Maroc est amené à
engager une nouvelle politique de qualité et de normalisation des produits et
des denrées alimentaires, afin d'améliorer leur commercialisation et renforcer
leur compétitivité.
Le développement du secteur de transformation et de conservation des aliments,
pour garantir l'approvisionnement alimentaire devient une nécessité absolue. Ce
secteur emploie en effet une main d'œuvre nombreuse tant rurale que citadine et
notamment des femmes, et constitue un puissant vecteur de croissance. Toutes
les opérations de transformation, qu'il s'agisse d'opérations à petite échelle
ou de grandes entreprises employant des milliers de personnes, doivent
s'appuyer sur une demande effective à laquelle il faut pouvoir répondre de
manière lucrative.
Le rôle primordial de ce secteur ressortira par la mise en place d'un système
capable d'assurer au consommateur un approvisionnement alimentaire adéquat,
abordable et sain et par l'optimisation du système de production.
CONCLUSION
L'évaluation des politiques en matière de sécurité alimentaire au Maroc montre
que notre pays a franchi des étapes importantes pour assurer un
approvisionnement régulier des populations en produits alimentaires agricoles
et halieutiques et d'ouverture sur l'économie mondiale.
Les acquis obtenus sont un atout précieux pour faire face aux défis à
confronter au cours des prochaines décennies, en matière de maîtrise de la
croissance démographique, de préservation des ressources naturelles (sol et eau
notamment) et enfin d'ouverture de notre agriculture sur les marchés
extérieurs.
Ces défis, qu'il y a lieu de surmonter dans les années à venir, consistent à
assurer la disponibilité et l'accès des populations à une alimentation
équilibrée et saine et concernent principalement:
La lutte contre la pauvreté : sur le plan macro?économique, à travers la
création des richesses et de l'emploi et leur répartition pour une population
jeune et appelée à s'accroître, et sur le plan social par le renforcement des
politiques alimentaires, à travers des actions de solidarité avec les couches
défavorisées en mettant en place des instruments d'aide alimentaire structurels
et pérennes. La Fondation Mohammed V pour la Solidarité, présidée par Sa
Majesté le Roi Mohammed VI, constitue la base de cette nouvelle politique.
Par ailleurs, il y a lieu de souligner les politiques de subvention des prix à
la consommation de certains produits appliquées par notre pays depuis plusieurs
années, notamment pour la farine et le sucre.
La stabilité de la production nationale: ce défi majeur ne pourra être
totalement relevé que dans le cadre d'une stratégie agricole et rurale fondée
sur une appréciation objective des contraintes et des marges de progrès de
l'agriculture nationale. A ce titre, il convient de signaler que l'agriculture
marocaine a constitué depuis l'indépendance, l'un des moteurs fondamentaux de
l'économie nationale. Elle a joué un rôle important dans la garantie de la
sécurité alimentaire du pays et par conséquent le bien être de la population.
Des résultats globalement positifs, quoi que modestes pour certains secteurs,
ont été acquis, notamment pour le sucre, le lait, les viandes et les fruits et
légumes. Ces résultats ont été obtenus grâce essentiellement à la politique des
barrages, d'aménagement hydro-agricoles et d'utilisation raisonnée et
efficiente de l'eau d'irrigation, menée par notre pays depuis l'indépendance.
Cependant, cette activité de production reste confrontée à un certain nombre
d'aléas, notamment climatiques, sanitaires, phyto?sanitaires et économiques qui
conditionnent de manière drastique ses performances.
Aléas climatiques :
L'élaboration d'une stratégie nationale d'adaptation à la sécheresse devient
une orientation prioritaire, compte tenu du caractère structurel de cet aléa.
En vue de combattre les effets néfastes de la sécheresse, cette stratégie doit
être axée sur la création et la mise en place d'un observatoire national sous
la forme d'un espace de partenariat, de concertation et d'échanges
d'information.
L'observatoire est un outil privilégié pour promouvoir les techniques de
gestion des risques, à travers l'intégration de prévisions fiables des
phénomènes atmosphérique précurseurs, le développement de systèmes d'alerte
précoce de la sécheresse et la préparation de plans opérationnels de lutte
contre ce fléau, avec une attention particulière sur la sensibilisation des
populations.
Aléas sanitaires et phytosanitaires :
L'intensification et la diversification de la production induisent
l'utilisation d'un paquet technologique comportant un matériel biologique à
haut potentiel de production et très souvent d'origine étrangère. De même,
l'industrialisation, la mondialisation et l'ouverture des frontières aux
produits étrangers, rendent plus pernicieux et plus graves les risques
sanitaires et phytosanitaires et augmentent les risques phyto?zoo?sanitaires
qui peuvent mettre en péril la production nationale. Ceci nécessite la mise en
œuvre d'une politique nationale conforme aux engagements internationaux,
sauvegardant les intérêts de notre pays et permettant de protéger la production
nationale contre les risques sanitaires et phytosanitaires venant de
l'étranger. Le virus TYLCV, qui n'existait pas au Maroc, et qui vient
d'attaquer la culture de la tomate, est une illustration parfaite de ces
risques.
De ce fait, il n'est plus concevable de mettre en œuvre des politiques de
contrôle par des procédures unilatérales et centralisées; les coopérations
régionales et internationales sont également une clef dans la recherche des
moyens permettant d'assurer une protection des productions nationales.
Aléas économiques :
Les enjeux relatifs à une grande ouverture et à la libéralisation de l'économie
nationale impliquent pour l'agriculture un effort considérable d'adaptation
sans lequel les parts de marché à l'export, durement conquises, et même celles
du marché intérieur, traditionnellement protégées, risquent d'être perdues au
profit de concurrents étrangers plus performants et plus entreprenants.
I1 s'agit de maîtriser les déterminants d'instabilité des marchés. A ce titre,
il est nécessaire de mettre en place des observatoires de suivi des marchés
nationaux et internationaux et des situations agro-économiques de nos
partenaires et de nos concurrents, de sorte à pouvoir anticiper et mener des
actions idoines en conséquence.
En parallèle, des organisations professionnelles actives doivent être
encouragées afin de mieux tirer profit de ces observatoires.
Pour faire face à ces défis, le Ministère de l'Agriculture, du Développement
Rural et des Eaux et Forêts a élaboré une stratégie de développement rural et
une stratégie de développement agricole qui identifient les potentialités et
les contraintes et examinent les chemins critiques et les convergences de
politiques qui pourraient aider à donner un sens concret à une vision possible
du développement agricole et rural à l'horizon 2020.
Cette stratégie a été examinée, débattue et adoptée par l'ensemble des acteurs,
opérateurs et intervenants dans le secteur agricole, lors du colloque national
de l'Agriculture, tenu en Juillet 2000.
Enfin, pour conclure, il y a lieu de soulever les principales interrogations
suivantes:
· Comment l'agriculture pourrait-elle continuer à jouer son rôle stratégique
dans la garantie de la sécurité alimentaire ?
· Quels sont les engagements de l'Etat pour la garantie de la sécurité
alimentaire et quel rôle doivent jouer les organisations professionnelles et
les opérateurs économiques dans ce domaine ?
· Est-ce qu'il n'est pas temps de réfléchir sérieusement sur la mise en place
de mécanismes institutionnels de concertation et de coordination dans les
domaines de la qualité et de la protection sanitaire et phytosanitaire ?
· N'est-il pas opportun de reconsidérer la politique de subvention des prix à
la consommation des