GENERIQUES
DAVID CONTRE GOLIATH ?
Phnix Scientific Innovation (PSI), une petite entreprise tournaisienne spécialisée en phytopharmacie, est en conflit ouvert avec la multinationale BASF. Celle-ci l'accuse de copier certains de ses herbicides pour betteraves sucrières. Le géant a fait apposer les scellés sur les stocks de produits tournaisiens incriminés. Copie ou pas copie ? La frontière est ténue. Stéphane Delautre-Drouillon, administrateur délégué de PSI, dit ignorer les arguments avancés par BASF pour motiver le juge des saisies du tribunal de Mons. Piratage ? "Je ne me sens pas l'âme d'un pirate, mais plutôt celle d'un corsaire, répond-il. Nous fabriquons des produits génériques à partir de brevets tombés dans le domaine public ; ceci nous permet de vendre des produits de grande qualité à bas prix: nous faisons économiser jusqu'à 50 % aux utilisateurs tout en réalisant nous-mêmes un bénéfice; nous sommes donc dérangeants pour les multinationales. Plusieurs d'entre elles ont éliminé ou racheté des firmes indépendantes ou elles ont créé des sociétés commercialisant des génériques. Elles ne tolèrent ces entreprises que dans la mesure où elles les contrôlent, afin de pouvoir fixer le prix des produits à leur guise. Les indépendants comme nous sont leurs bêtes noires, même si mon petit groupe ne réalise que 200 millions de CA avec 20 personnes. Les agriculteurs qui utilisent le produit savent qu'il est efficace. Évidemment, ils se posent des questions : pourquoi une telle différence de prix entre deux spécialités si les résultats sont identiques ?"
A la question du financement de la recherche, le patron de PSI répond : "D'accord, les brevets ont été créés pour permettre aux firmes d'amortir leurs énormes investissements, mais un brevet de 20 ans est plus que suffisant pour amortir le prix de la recherche."
En attendant, Stéphane Delautre-Drouillon craint pour l'avenir de ses sociétés : "Cette attaque de BASF n'est pas innocente ; elle coïncide avec la période d'utilisation de nos produits : 80 % du CA sont réalisés entre la mi-mars et la mi-juin." Malgré notre demande, au moment de mettre sous presse, BASF n'avait toujours pas commenté sa décision.
Trends Tendances - 27 mars 1997